lundi 16 juillet 2012

2012 : les abus de la finance mondiale sont de nouveau au pilori



Il est à peine croyable que, après la crise de 2008, la finance ait à ce point ignoré les leçons de ses abus. L’accumulation de ceux-ci durant le premier semestre de 2012 constitue une confirmation que certaines pratiques, malgré des règlementations accrues, continuent à se poursuivre à travers les marchés financiers.

  1. 1.L’utilisation des fonds propres pour des activités spéculatives : c’est le cas de JP Morgan qui a donc perdu $ 5,8 milliards sur ses opérations à Londres. En gonflant son Corporate Investment Office, la banque a effectivement cherché à utiliser une exception à la Volcker Rule interdisant d’utiliser ses fonds propres enproprietary trading. Cette exception , qui avait fait l’objet d’un lobbying effréné des banques et devait en principe permettre la couverture de risques, a amené la banque à prendre des positions spéculatives additionnelles.  Les enquêtes parlementaires sont en cours.

  2. 2.L’utilisation des fonds de clients pour renflouer les fonds propres : c’est le cas de MF Global, dirigé par un ancien patron de Goldman Sachs, ancien Sénateur et ancien Gouverneur du New Jersey. Le courtier a menti à sa banque dépositaire en affirmant que les fonds mis en dépôt pour assurer son ratio de solvabilité étaient de vrais fonds propres. Il était affecté par des pertes sur des positions spéculatives, notamment en obligations souveraines européennes. Elle est en faillite et ses clients tentent désespérément de récupérer leur argent qui n’aurait jamais du être mélangé avec les fonds propres du courtier. Les autorités de contrôle ont tenté d'arrêter cette situation. On attend le résultat des procédures judiciaires en cours.

  3. 3.Le détournement par un courtier de fonds de clients. Peregrine Futures est en faillite. C'est un  courtier en produits dérivés. Son patron, Russel Wassendorf, a reconnu dans la note accompagnant son suicide manqué, avoir détourné 200 millions de dollars pour sauver la situation de son fonds. Il est arrêté.

  4. 4.La manipulation du taux LIBOR du marché interbancaire par une douzaine de banques européennes et américaines est devenue affaire d'Etat. L’amende de 350 millions d’euros de Barclays et la démission de plusieurs de ses dirigeants ne sont que le début de cette saga. Dès 2008, le Trésor américain avait déjà remarqué des tentatives de sous-estimation pour protéger la réputation des banques et proposé par écrit é la Bank of England de revoir le fonctionnement du LIBOR.  Récemment ce sont des surévaluations qui ont été remarquées. On attend des amendes de plus d’un milliard de dollars pour d’autres banques.  C’est la fraude la plus importante de l’histoire financière. Des poursuites penalesnsont envisagées.

  5. 5.Le délit d’initié dans le trading de hedge funds. Le cas du hedge fund Galleon a valu à son patron une peine de de 14 ans de prison et on attend la sanction d'un de ses amis, ancien managing partner de Mc Kinsey. Administrateur de Goldman Sachs il a quitté une séance cruciale du conseil d’administration pour informer le hedge fund quelques minutes avant la clôture du marché, de l’entrée de Warren Buffet (Berkshire Hathaway) au capital de Goldman Sachs. Ce dernier a immédiatement acheté des actions de l'auguste firme. Il attend de connaître la sentence de sa condamnation pour ce délit d’initié. Au Japon, les autorités viennent de lancer une enquête de grande ampleur pour délit d'initié sur les activités de Japan Advisory LLC qui avait des liens particuliers avec des hedge funds.  Aux Etats-Unis, on a enfin aboli la disposition qui exemptait les membres du Congrès tandis que les diplomates américains tentent de garder ce privilège.

  6. Ces cas sont différents mais montrent une résistance fondamentale des dirigeants des institutions financières aux nouvelles (ou anciennes) réglementations. Se croient-ils au-dessus des lois ? Espèrent-ils  ne pas être pris ? Ce sentiment de surpuissance est loin d’être éradiqué au sommet des institutions financières ou dans les salles de marché.
Dans chacun de ces cas cependant, les autorités financières semblent ne pas avoir été jusqu’au bout de leurs responsabilités. La Bank of England n’a pas pris les mesures nécessaires pour la réforme du LIBOR. La SEC a été négligente dans la surveillance de l’allocation des fonds propres des courtiers. Que faisaient les dizaines de représentants de la Federal Reserve installés dans les bureaux de JP Morgan ?

Alors que les faits sont, sinon connus, du moins suspectés, il y aurait comme une hésitation à s’attaquer à de telles situations potentiellement explosives. Cela nous rappelle qu’il est difficile de contrôler concrètement les abus de la finance. Ils sont le fait de dirigeants ou de traders infiniment mieux formés et rémunérés que ceux et celles qui doivent les superviser. Ils sont aussi soumis à des pressions politiques.

Cette question reste ouverte. Il ne suffit pas de changer la règlementation. Encore faut-il se doter des moyens nécessaires à leur implémentation.  Les républicains ont refuse toute augmentation des moyens des autorités de contrôle.  Un bon moyen d’éviter que les abus soient détectés et sanctionnés.

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