De nombreux désaccords subsistent entre les dirigeants de l'Union européenne sur le détail de la future architecture de la zone euro, à quelques heures d'un sommet européen dont les résultats devront convaincre la BCE de faire plus pour soutenir les pays en difficulté et assurer la pérennité de la monnaie unique.
Sur la forme, les jeux restent également ouverts entre une réforme des traités européens à 27 et en bonne et due forme et la signature d'un nouveau traité entre les seuls 17 pays qui partagent l'euro, jugé plus rapide à mettre en oeuvre.
La France et l'Allemagne, qui se sont entendues lundi sur une série de propositions, ont transmis mercredi au président du Conseil européen Herman Van Rompuy une lettre de quatre pages détaillant les réformes que les deux pays jugent nécessaires.
Toutefois, ce dernier a pris les devants et préparé un rapport qui ne reflète que partiellement la contribution franco-allemande au débat.
Le texte promet des discussions animées entre les dirigeants des Vingt-Sept jeudi et vendredi à Bruxelles sur des sujets tels que la capacité d'intrusion qu'auront les autorités européennes dans les budgets nationaux ou la perspective de créer à terme des euro-obligations.
Selon plusieurs sources proches des négociations, la France et l'Allemagne, qui ont pris connaissance du rapport Van Rompuy, ont réaffirmé mercredi leur veto à ces obligations communes, pourtant défendues par une majorité de pays de la zone euro.
"C'est totalement exclu. Il y a un veto allemand. Et il y a une veto français. Le rapport n'a pas altéré les positions énoncées lundi", a dit l'une des sources.
PARIS ET BERLIN SUR LA MÊME LIGNE
Paris et Berlin sont également désormais sur la même ligne sur la question du contrôle budgétaire.
Ils proposent dans leur lettre que la Commission soit chargée de déclencher les procédures de sanctions, qui feront l'objet d'une discussion politique au sein de l'Eurogroupe mais ne pourront être arrêtées que si une majorité qualifiée de pays s'y oppose, un compromis qui est susceptible d'être entériné par le reste des membres de la zone euro.
En revanche, les discussions sont plus difficiles sur la forme que prendra le futur mécanisme de stabilité financière (MES), qui prendra la suite de l'actuel Fonds européen de stabilité financière (FESF) et dont Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont dit vouloir avancer l'entrée en fonction à 2012.
Si les deux pays ont clarifié le fait que le MES agirait selon les principes du Fonds monétaire international pour ce qui est de la participation du secteur privé et que la Grèce resterait un cas unique, ils continuent de s'opposer sur le plafond de ce fonds et sur ses prérogatives.
Afin d'en doper la capacité effective de prêt, qui avait été fixée au printemps à 500 milliards d'euros, les Européens discutent de la possibilité de le doter d'une licence bancaire - qui lui donnerait accès aux fonds illimités de la BCE - et de le déplafonner, deux propositions formulées par Herman Van Rompuy.
La France y est favorable mais Berlin continue de s'y opposer fermement, considérant que cela reviendrait à donner une garantie illimitée aux Etats et retirerait toute incitation à la discipline et aux réformes.
Les deux pays sont en revanche d'accord pour en revoir les procédures de décision afin d'abandonner l'unanimité et installer un système de "supermajorité" représentant 85% de la clé de répartition au capital de la BCE, un point également repris à son compte par Herman Van Rompuy.
Mais cette fois, ce sont les petits Etats, et notamment la Finlande, qui s'y opposent fermement.
LA BCE ATTEND DES RÉSULTATS
A ces questions de fond s'ajoutent des interrogations sur la forme que doivent prendre ces réformes, alors qu'une révision des traités semble de plus en plus incertaine et que la perspective de voir un nouveau traité ad hoc signé uniquement par les membres de la zone euro gagne en puissance.
Berlin et Paris continuent certes d'insister officiellement sur leur volonté de procéder à 27 dans le cadre des institutions actuelles mais ils se déclarent prêts dans leur lettre à "aller de l'avant" avec les seuls pays de la monnaie unique.
D'autant qu'une réforme des traités prendrait au bas mot de 12 à 18 mois, une laps de temps jugé trop long face à la pression des marchés et aux échéances de refinancement de dette du début 2012 de pays comme l'Italie ou l'Espagne.
D'autant aussi que le Royaume-Uni a prévenu à plusieurs reprises ces derniers jours qu'il lierait une telle révision des traités à des concessions en matière de répartition de compétences entre Londres de Bruxelles, avec notamment la volonté d'obtenir un droit de veto sur la régulation des services financiers.
Compte tenu de ces incertitudes sur l'issue du sommet, plusieurs sources européennes ont indiqué mercredi à Reuters que la BCE n'interviendrait plus activement pour soutenir les pays en difficulté que si les Etats membres de l'UE s'engageaient de manière forte à Bruxelles sur un nouveau "pacte budgétaire" et inscrivait celui-ci dans le marbre des traités.
Selon ces sources, l'institut de Francfort a été activement impliqué dans la préparation des propositions visant à dessiner la nouvelle architecture de la zone euro alors que son président, Mario Draghi, avait lié un rôle plus actif de la banque à ce nouveau pacte budgétaire.
Julien Toyer,
reuters
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