jeudi 2 février 2012

L'envers du « miracle allemand »: précarité généralisée et intensification de l'exploitation


L'Allemagne est présentée comme un exemple exceptionnel de croissance économique et de lutte contre le chômage dans le contexte actuel de crise mondiale. En réalité, derrière le « miracle allemand », se trouve la veille recette capitaliste consistant à intensifier l'exploitation que subissent les travailleurs.

Les chiffres qui ont fait la une des gazettes indiquent qu'en 2011 ont été créés en Allemagne 535 000 emplois par rapport à 2010, faisant descendre le taux officiel à 6,8%, selon l'Agence fédérale pour l'emploi, le taux le plus faible depuis la soi-disant réunification.

Dans ce contexte de crise capitaliste mondiale, avec un impact particulier sur le niveau de chômage dans l'espace commun européen, les statistiques ont été présentées comme un élément d'un miracle ou, plus précisément, d'une formule dont, de façon explicite ou déguisée, on suggère l'application dans les autres pays qui cherchent une solution à la situation dans laquelle ils se trouvent.

Des spécialistes renommés (il y a toujours des spécialistes renommés qui commentent ces questions) comme un chercheur à l'Institut pour l'Economie mondiale, avec une analyse de marché digne d'une grande entreprise privée, garantissent que, en dépit de la crise, l'Allemagne continue à s'affirmer comme le moteur économique de l'Europe en raison de sa compétitivité en matière salariale et de sa capacité de diversification de ses exportations, notamment vers la Chine (BBC World, 3 janvier).

En réalité, cette prétendue capacité de dépassement/gestion, de la part du système, de ses propres contradictions, est contestée. La contradiction n'apparaît pas avec la même vigueur, mais elle laisse percevoir que de l'opulence des exploiteurs ne tombent même plus, comme il fut un temps, des miettes pour les exploités.

Selon l'économiste Julia Martínez, les statistiques de l'emploi masquent la réalité de la période que nous vivons. Dans un article publié dans Rebelion, la professeur de l'Université centro-américaine dénonce le fait que la base de ce « miracle » est l' « institutionnalisation et la généralisation de la précarité » présentée sous l'euphémisme de la flexibilisation du marché de l'emploi.

L'ingrédient principal de la recette, en 2011, fut ce qu'on appelle le micro-emploi, c'est-à-dire, la prolifération de contrats temporaires, d'un maximum de 80 heures par mois avec des salaires plafonnés à 400 euros, dénonce-t-elle.

Intensification de l'exploitation

L'an dernier, 7,3 millions de travailleurs se trouvaient dans cette situation, soit 25% de la population active, gagnant, en moyenne, 230 euros de revenus mensuels.

Avec 120 euros par tête au titre de la contribution à la Sécurité sociale ou aux fonds de pension, explique encore Martinez, le patronat est à l'origine d'une brutale dépréciation de la rémunération de la force de travail et s'assure de généreuses exonérations fiscales, prévues par ce type de contrats.

Pour le travailleur, il reste à ses frais la contribution volontaire à la Sécurité sociale ou aux fonds de pension, et des revenus de misère, qui, en Allemagne, sont de plus en plus garantis par les aides familiales et les allocations de l’État.

Pour l’État (l'ensemble des contribuables, dans leur majorité des salariés), il reste des milliers de travailleurs pauvres éligibles aux aides, bien qu'ils aient un emploi. A Berlin, un cinquième de la population dépend des aides de l’État pour survivre.

Dans la pratique, ce sont les fonds publics (à travers les prestations sociales et les cadeaux fiscaux aux entreprises) et l'intensification violente de l'exploitation de la main d’œuvre qui soutiennent le « miracle » allemand, conclut-elle.

Dans ce contexte, ajoute-t-elle dans l'article, il n'est pas surprenant que les indicateurs officiels, se référant également à l'an passé, affirment que les revenus des plus riches aient progressé en Allemagne huit fois plus que ceux des plus pauvres (OCDE) ; que se renforcent les inégalités et la pauvreté (Association d'assistance publique), et que les plus touchés par la précarité – femmes et jeunes – ne trouvent pas dans le micro-emploi l'intégration souhaitée vers des emplois à temps plein avec un salaire décent, mais précisément l'inverse (Ministère des affaires familiales, des personnages âgées, des femmes et de la jeunesse).

Source: Avante, organe du PC Portugais

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