L’image de la Chine est régie par une série de stéréotypes à l’étranger, mais aussi à l’intérieur du pays. Il est souvent dit que les Chinois ne savent pas et ne veulent pas mener les guerres, et que traditionnellement la culture chinoise défend le pacifisme en restant passive sur la scène internationale. Ces stéréotypes sont basés sur la période semi-coloniale de l’histoire chinoise qui date de l’époque de la Première guerre de l’opium (1839-1842).
La littérature politique chinoise est remplie de références concernant les canons confucéens qui expliquent la tendance des Chinois à faire des compromis et éviter les conflits. Si la culture chinoise est fondamentalement confucéenne, la culture européenne est fondamentalement chrétienne. En faisant le sermon de la paix, de l'amour fraternel, en pardonnant les ennemis, le christianisme va beaucoup plus loin que toute autre religion. Mais cela n'a pas empêché l'Europe de devenir à une certaine époque l’une des régions les plus militarisées du monde pour conquérir et asservir de nombreux peuples qui se trouvaient dans le voisinage. La théorie et la pratique historiques peuvent souvent diverger.
Tout au long de l’histoire, l’expansion territoriale de la Chine était limitée par des facteurs culturels, idéologiques, religieux, mais aussi naturels et militaro-techniques. Dès la dynastie Han (206 av. J-C. – 220), l’Empire chinois a déjà atteint ses frontières naturelles. Et la progression au-delà de ces frontières s’est avérée difficile. Les steppes, les déserts, mais aussi les montagnes et les forêts denses représentaient des obstacles sérieux pour les armées des empires agricoles de la période préindustrielle. Même si les guerriers arrivaient à outrepasser ces obstacles, il leur était difficile de superviser de ces zones à cause des difficultés d'approvisionnement et de contrôle territorial.
Et pourtant, au cours de nombreux siècles de son histoire, l’Empire chinois qui n’avait pas d’objectif d’expansion, a essayé cependant d’élargir ses frontières au-delà des limites imposées par la nature. Toutefois, ces missions militaires difficiles et coûteuses en Corée, en Indochine, en Asie Centrale et au Tibet se soldaient régulièrement par des échecs, malgré des victoires ponctuelles de l’armée chinoise dans ces régions.
Ces limites naturelles de l'expansion territoriale chinoise ont été outrepassées pour la première fois au 17e siècle, lors du règne de la dynastie manchoue Qing (1644-1911), sous laquelle de nombreuses campagnes militaires de la cavalerie ont été organisées dans des conditions climatiques des steppes de la Mandchourie et de la Mongolie. Bien que le règne de la dynastie Qing soit associé avec la stagnation, le déclin et la défaite de l’Empire, au tout début, la dynastie mandchoue a connu un siècle de prospérité sans précédent et un expansion territoriale importante.
Malheureusement, la force de la Chine s'est transformée en sa faiblesse.
L’hégémonie, garantie par la situation géographique a conduit à la stagnation de l'organisation militaire de l’empire. La Chine est passée à côté de la révolution qu’a connue l’Europe au cours des 15e -17e siècles. Il s’agissait d’une révolution militaire, avec notamment le développement des armes à feu, mais aussi d’une révolution tactique, avec un changement du système de recrutement et de commandement de l’armée. Cette période de faiblesse militaire de la Chine face aux puissances occidentales et le Japon, devenue évidente au 18e siècle, n’est pas liée aux particularités culturelles ou historiques de la Chine.
Les échecs que l’Empire du Milieu a connus au cours des guerres de la fin 19e - début 20e siècle et le stéréotype des mauvais soldats chinois n’est rien d’autre qu’une conséquence des facteurs politiques, économiques et institutionnels. Si l'on prend en compte les qualités moraux et psychologiques individuels des soldats chinois, il ne faut pas creuser longtemps pour trouver des exemples illustrant ce fait. Des milliers de Chinois ont participé à la guerre civile des années 1917-1923 en Russie. En se retrouvant dans une organisation militaire moderne et efficace, ils ont fait preuve des qualités individuelles exceptionnelles.
L’attitude de la Chine par rapport à la guerre et l’expansion territoriale – c’est un problème de la politique mondiale, mais aussi de la politique intérieure du pays. Suite à la transformation de la Chine en une superpuissance économique, c’est inévitable que l’Empire du Milieu devienne également la première puissance militaire du monde. Les théories sur une éventuelle « menace chinoise » commencent à émerger actuellement. D'autre part, des sentiments en faveur de la défense de ses propres intérêts par la voie militaire commence à être plus répandue. Le gouvernement de la RPC est souvent critiqué pour sa faiblesse et son indécision.
La politique de la Chine – c’est un ensemble complexe de facteurs politiques, économiques et de leur évaluation par le gouvernement de la RPC. Et comme dans n'importe quel autre pays, sous l'influence de ces facteurs, la politique peut changer dans n’importe quelle direction.
Vassili Kachine